Je suis ici
et ailleurs

«La» logique est-elle comme le bon sens, les arguments de ceux qui n’en ont pas? Hume[1] écrivait ainsi que la proposition «le soleil ne se lèvera pas demain» n’est pas moins intelligible et n’implique pas plus de contradiction que l’affirmation «le soleil se lèvera demain»: le fait que le soleil se lève n’est pas plus une nécessité logique que le fait qu’il ne se lève pas. Cette réflexion marque les faiblesses de l’expérience et de l’induction: «Peu importe le nombre de cygnes blancs que j’ai vu, cela ne signifie pas que tous les cygnes sont blancs[2]». De même, écrivait Hume, nous n’aurions eu rien à redire si nous vivions dans un monde où le soleil se lève à l’ouest pour se coucher à l’est. Quant au bon sens, il peut être légitimement présenté comme l’ennemi du scientifique: «Il fallait être Newton pour remarquer que la lune tombe quand tout le monde voit qu’elle ne tombe pas[3]». Ces réflexions préliminaires doivent nous amener à soupçonner «la» logique: dans son roman policier, Maigret a peur (1953), Simenon(1903-1989) refuse d'établir une partition nette entre la folie et la santé mentale.

Pour son personnage, le docteur Vernoux, un fou n'agit pas sans logique mais selon sa logique, une logique incompréhensible pour les gens normaux mais que lui comprend et suit inexorablement. Par analogie, la logique de Dieu ne serait-elle pas comparable à celle d'un fou[4], au sens où, si elle existe bien, elle serait incomprise par le sens commun? A partir de là, il nous appartiendra donc de nous hisser à sa hauteur, ou, plus modestement, d’essayer.

Il existe en effet plusieurs manières d’envisager le rapport de l’homme à la connaissance du monde de Dieu: ainsi, le providentialisme soutient l’idée que l’homme ne peut comprendre l’intégralité du projet de Dieu, il est assez modeste dans son amibition. A l’opposé, Hegel(1770-1831) déclarait en 1818 que «le courage de la vérité, la foi en la puissance de l’esprit sont la première condition de l’étude philosophique; l’homme doit s’honorer lui-même et s’estimer digne de ce qu’il y a de plus élevé. De la grandeur et de la puissance de l’esprit il ne peut avoir une trop grande opinion. L’essence fermée de l’univers n’a en elle aucune force qui pourrait résister au courage du connaître…». Pour nous situer par rapport à ces deux attitudes, nous qualifierons notre projet de très ambitieux: il est possible de résoudre, avec une très grande précision et une très grande certitude, les grandes questions que se pose l’humanité à son stade d’évolution. Nous ne conclurons donc pas notre ouvrage par une défaite de la pensée consistant à déclarer que la philosophie est plus intéressante par les questions qu’elle pose que par ses réponses invérifiables.

[1] David Hume (1711-1776), ENQUÊTE SUR L’ENTENDEMENT HUMAIN (1748)

[2] Karl Popper (1902-1994), LA LOGIQUE DE LA DECOUVERTE SCIENTIFIQUE (1959)

[3] Paul Valéry (1871-1945), MÉLANGE (1939)

[4] Corinthiens : «La folie de Dieu est plus sage que la sagesse des hommes».

Pierre BUISSART est né le 9 mars 1984, à Saint-pol sur Ternoise, dans le Pas-de-Calais, d’une famille d’agriculteurs. En 2002, il intègre l’Université catholique de Lille dans le cadre d’un DEUG AES (Administration Économique et Sociale) et d’un module préparatoire à science politique, qu’il obtient.

En 2010, il intègre l’ESC Lille (SKEMA) en master spécialisé «gestion fiscale de l’entreprise», il réalise une nouvelle fois que la fiscalité dite « moderne » n’est pas au service des citoyens et constitue un piège pour la croissance économique.

En 2019, conscient que son travail arrive à son terme et sur les conseils d’un responsable du pôle recherche de l’université catholique de Lille, il contacte les éditions Vérone à Paris pour publier sa thèse «je suis ici et ailleurs» qui paraîtra vers Noël. Il annonce également à ses amis son intention de briguer la mairie de la ville de son coeur: Lille.